Un Crime dans la tête

( The Manchurian Candidate)

Un film de Jonathan Demme

 

Avec Denzel Washington, Liev Schreiber, Meryl Streep, Jon Voight, Ted Levine…

 

Cinéaste engagé, Jonathan Demme, réalisateur du brillant Philadelphia et plus récemment du documentaire The Agronomist, consacré au journaliste haïtien Jean Dominique, il s’attaque cette fois à un sujet d’actualité à savoir la manipulation de l’opinion publique, des médias, à des fins mercantiles et politiques.

Si le propos est extrême (altération de la mémoire par opération) et dessert parfois le film, il reste que le scénario, extrêmement bien construit joue avec nos nerfs longtemps.

Manipulations de grands groupes économico-politiques (une belle parabole pour identifier Clearstream, Carlyle ou Halliburton), manipulation médiatique (Fox News ?), fanatisme des supporters et opposants comme dans les scènes de foule, véritables reconstitutions de shows républicains ou démocrates, manipulation de l’entourage… syndrome omniprésent de la guerre, en l’occurrence celle du Golfe… Tout les ingrédients du thriller politique sont réunis.

Là où Jonathan Demme réussit son coup, c’est en faisant écho à la situation politique actuelle, volontairement ou non, ce parallèle saisissant entre les Etats-Unis aujourd’hui, prise dans le malaise d’une guerre du Golfe qui est un bourbier, les élections volées de 2000 et leurs conséquences dramatiques sur la stabilité du monde, la manipulation économiques des grands groupes de l’armement, du tabac ou du pétrole, l’insulte faite aux américains, soldats ou non, combattants ou citoyens, républicains ou démocrates.

Denzel Washington est impeccable, Meryl Streep impressionnante en mère odieuse, manipulatrice et tentatrice, Liev Schreiber excellent, glaçant de son regard et de sa stature, ambigu homme objet.

Quelques bons seconds rôles comme Jon Voigt ou Ted Levine renforce le casting.

Côté réalisation, Demme filme au plus près des visages et des corps, comme pour mieux déceler les émotions, les peurs de chacun. On peut regretter un manque d’opportunisme dans certaines scènes, comme la scène de bataille, plutôt terne, la voix-off au début du film, un peu longue.

Mais l’ensemble reste énergique, brutal, le meilleur film de Demme depuis Philadelphia.

A noter que Wyclef Jean, déjà collaborateur à la musique de The Agronomist signe quelques titres de ce film.

A voir, surtout en cette période de rêves désabusés…

Arnaud Meunier

09/11/2004